Glissement de terrain à La Baie : Engagement, résilience et empathie

En avril 2022, dès la fonte des neiges, plusieurs glissements importants présentant des risques de sécurité majeurs  ont ébranlé la grande région du Saguenay. La Ville de Saguenay mandate Englobe pour effectuer une analyse approfondie de plusieurs talus afin de déceler des risques de glissement de terrain. Aggravées par d’intenses pluies comparables à celles du sinistre de Saint-Jean-Vianney, nous détectons des fissures importantes dans un talus de la municipalité de La Baie. Une première évacuation préventive de 6 résidences est effectuée. Dès lors s’amorce une campagne d’investigation menée par Englobe, la Ville de Saguenay et la Direction de la Géologie et Géotechnique du ministère des Transports et de la Mobilité durable. Le 13 juin, le glissement de terrain survient et l’état d’urgence régional est déclaré. Englobe, grâce à son expertise ainsi que la qualité et le dévouement de ses professionnels, a joué un rôle crucial pour la suite des choses.

 

Dans un monde d’hyperspécialisation technique, nous avons agi à titre d’intégrateur agile et flexible, capable de gérer autant l’humain que la technique, du début à la fin, d'un contexte incertain et complexe tout en permettant aux résidents de retrouver leur bien-être et leur terre d’origine guérie. 

L’humain avant tout

 

En temps de crise, nous voulions avant tout nous assurer de préserver la vie et la dignité humaine des sinistrés. Les premières évacuations préventives effectuées en avril ont sauvé les vies des résidents de l’habitation détruite dans le glissement du 13 juin. Nos analyses géotechniques menèrent à l’identification de la nature argileuse du sol et du caractère rétrogressif du glissement de terrain pouvant mener à des glissements additionnels sous forme de coulées boueuses mortelles. Agrandissant significativement la zone à risque, nous avons procédé à l’évacuation urgente totale de 83 résidences, sauvant potentiellement 230 résidents.

 

De surcroît, ceci stabilisa le sol argileux imprévisible et fragilisé par les fortes pluies saisonnières, en le déchargeant d’un poids considérable. Notre supervision des travaux de renforcement de la zone à risque permit de sécuriser des ouvrages municipaux, pharmacies, banques, supermarchés et une usine d’épuration d’eau, préservant ainsi des emplois locaux, l’accès aux services essentiels et surtout le quotidien normal des citoyens.

 

Considérant la haute médiatisation du sinistre, l’état d’urgence décrété dans la municipalité et l’historique régional pour ce type de cataclysmes, la sensibilité des résidents était très éprouvée. Par notre proximité avec la communauté, nous avons joué un rôle technique sécurisant et humanisant. Ceci se traduisit par notre intervention sur plus de 50 sites sensibles présentant des risques similaires durant la même période, la gestion des inquiétudes citoyennes, des processus de destruction et d’évacuation des 7 résidences à risque, l’évacuation des biens des citoyens affectés et la mobilisation des ressources humaines et matérielles nécessaires.

Un défi de taille

 

Une fois l’état d’urgence régionale décrété par le ministère de la Sécurité publique, nous avons dû organiser un chaos social frénétique, empreint d’inquiétude citoyenne, en balisant et opérationnalisant très rapidement des initiatives critiques dans un projet réalisable et détaillé. En étroite collaboration et en support aux experts de la Ville de Saguenay, du ministère de la Sécurité publique et du ministère des Transports et de la Mobilité durable, nous avons mobilisé immédiatement une équipe multidisciplinaire à l’échelle provinciale, tout en organisant leur travail selon des étapes de projet précises soumises à des standards contractuels établis.

 

Collaborant avec des intervenants municipaux et provinciaux, vu leur vélocité processuelle variée, il fut difficile de naviguer leurs différents appareils administratifs pour obtenir les différents requis du projet à temps. En créant une chaîne opérationnelle robuste, nous avons offert un accès privilégié et rapide aux décisionnaires et aux ressources nécessaires à la réalisation du projet. Selon David Boily, directeur Ingénierie - Infrastructures civiles, « avec la quantité impressionnante d’intervenants, les courts délais dans lesquels nous devions opérer et la gravité de la situation, il était essentiel de faciliter l’accès aux ressources humaines et matérielles pour mener le tout à bon port ». 

 

Des conditions météo aggravantes complexifièrent notre mandat. L’arrivée du gel des sols, un apport important de neige et des fontes rapides créèrent un climat parfait pour l’avènement de glissements de terrain potentiels additionnels à l’échelle régionale. Soumis au même état d’urgence, nous avons dû gérer simultanément et avec efficacité extrême, d’autres événements similaires sur le vaste territoire du Saguenay dans des délais très courts. Situation hautement médiatisée, nous devions minimiser le bruit et les fuites informationnelles. Donc, nous avons centralisé et homogénéisé l’information dans un journal hebdomadaire synthétique, tout en assurant la rectitude technique et administrative des interventions menées par les responsables municipaux opérant dans la cellule de crise créée à cet effet.

Restaurer la terre et la dignité locale

 

Le glissement de terrain ayant sérieusement endommagé un secteur important de la région de La Baie, il était primordial de lui redonner sa dignité et sa beauté. Initialement, la méthode classique de stabilisation des sols par roche fut employée. Vu notre expertise en phytotechnologie, nous avons bonifié cette technique en intégrant des concepts de végétalisation. Cette méthode a été doublement gagnante, car elle permit non seulement d’améliorer et d’embellir l’environnement existant en lui amenant plus de finesse, mais était aussi parfaitement adaptée à la constitution particulière du sol, soit sa composition à prédominance d’argile. En effet, le réseau racinaire des espèces végétales implantées permet non seulement de restaurer et de solidifier le talus endommagé, mais d’assécher le sol plus rapidement lors de pluies sévères, diminuant de surcroît les risques de liquéfaction de l’argile pouvant occasionner de dangereuses coulées boueuses. Ainsi, la pérennité du sol endommagé a pu être assurée tout en prévenant efficacement de futurs incidents similaires. 

 

Afin de restaurer l’écosystème à son état d’origine tout en le respectant, il était indispensable de bien l’étudier afin d’en comprendre sa constitution. Donc, après analyse, nous avons privilégié l’utilisation d’espèces indigènes approvisionnées localement composées d’épinette blanche, de sapin baumier, de pin gris, de physocarpe et de cornouiller. Mélangeant génie civil et agronomie, nous avons harmonisé le milieu endommagé en lui redonnant sa valeur sécuritaire, sa fierté et son panache originel d’une manière telle à en effacer les vestiges du sinistre, et ce, à moindre coût pour l’environnement et la psyché collective.